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Nov 20th, 2019
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  1.  
  2. ANTITHESE
  3. Pour autant, les arts numériques ne vont pas que réactualiser ces problématiques esthétiques : il s'en développe de nouvelles avec eux.
  4. Bien que, comme le cinéma, le jeu se soit développé depuis une industrie et non pas dans un contexte purement artistique, un besoin de développer le jeu et ses particularités dans une direction tenant de l'Art a fini par se faire ressentir. C'est ainsi qu'à contrepied de la tendance dominante va se développer l'Artgame, c'est-à-dire un jeu vidéo ayant pour volonté d'être purement artistique, et donc de s'émanciper de l'aliénation tenue par une industrie de la reproduction massive.
  5.  
  6. Avec la diffusion massive de nombreux médias s'est développé une nouvelle problématique d'esthétique : les récepteurs des oeuvres étant sans cesse bombardés d'images, sons, et autres stimuli, il a été nécessaire à ces oeuvres de se concevoir avec cette idée d'optimiser au mieux la capture de l'attention. Ce problème est d'autant plus importante que les écrans sont désormais amovibles, et constitue une part importance de notre vie à tout instant. Par exemple, les musiques se sont raccourcies et cherchent avant tout à émettre une mélodie obsédante , en brisant la tradition de l'introduction. Les jeux vidéo ont eux-mêmes subi de grands changements au travers du smartphone : ils doivent être encore plus faciles d'accès, et donc proposer des clés de lecture bien connus des joueurs, et proposer une grande jouissance immédiate, quitte à perdre en complexité. Là où le cinéma inspire peu à la contemplation due a ses contraintes technologiques, elle est complètement inaccessible au jeu mobile par la méthode de consommation majoritaire du smartphone et du fort aspect cathartique recherché pour ses jeux.
  7.  
  8. Ainsi, alors que de nombreux jeux prennent la voie de la pure catharsis et se refuse d'assumer leur contexte de création, l'Artgame va s'engager politiquement. On est alors en droit de se poser la question des différences vis-à-vis de la simple propagande. Benjamin a écrit que l'aura de l'oeuvre se retrouve dans la tradition, son contexte historique. En s'engageant, l'Artgame va se raccrocher à son contexte pour retrouver une certaine unicité, tout en profitant de la reproduction pour étendre sa réflexion à un maximum de personnes. En décidant de ne pas s'offrir pleinement et immédiatement au joueur au travers de sa jouabilité, et de forcer ce dernier à comprendre comment le jeu fonctionne en jouant sur des standards dans le domaine du jeu, l'Artgame prend une position de contre-culture, qui détourne le média du jeu vidéo. Le but alors est plus subtil qu'une simple propagande, car il veut se faire questionner le joueur par ses propres usages et comportements sur l'oeuvre elle-même - l'expérience elle-même devient questionnement. On peut le voir au travers de "Unmanned", conçu par Paolo Pedercini et la Molleindustria qui s'ancre dans un contexte de la guerre à distance, et qui utilise le jeu comme une fenêtre qui à la fois exprime un propos, mais aussi comme un miroir renvoyant le joueur à sa propre condition, et qui pousse à faire le parallèle.
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  10. Une autre manière que l'Artgame a pour lutter contre la reproduction massive est de récupérer une oeuvre reproductible, et l'utiliser comme matériau de base en la modifiant, l'a rendant ainsi unique par le contraste de son existence vis-à-vis des milliers d'autres exemplaires de l'oeuvre originale. Il peut aussi la rendre unique en modifiant les périphériques d'interaction avec cette oeuvre numérique, restaurant ainsi une sorte de "lieu de culte" et rendant l'oeuvre plus difficile à reproduire. Toutes ces techniques sont observables avec la reprise du jeu "Hogan's Alley" par Cory Arcangel, qui le modifiera pour le transformer en le jeu "I Shot Andy Warhol". Il ira plus loin encore, en modifiant le périphérique en forme de pistolet permettant de jouer, et en désactivant la fonction de tir.
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  12.  
  13. [Transition]
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  15. SYNTHESE
  16. Malgré la reproductibilité des arts numériques, la perte de l'aura, n'y aurait-il pas une forme d'unicité que l'on pourrait retrouver dans le jeu vidéo, non plus dans l'oeuvre en tant que telle, mais ailleurs ?
  17.  
  18. Combien l'oeuvre en elle-même serait reproductible, il est en effet possible de se concentrer sur un aspect non-reproductible : l'expérience. Le jeu vidéo se place alors comme un nouvel espace d'expression limité par certaines règles qui servent de palettes d'outils. Le joueur peut alors reprendre en main la création et devient co-auteur. Il y retrouve alors le hic et nunc, l'unicité de son expérience car un même jeu peut se jouer une infinité de fois différentes. Il n'aura pas la même expérience qu'un autre individu ayant joué au même jeu.
  19.  
  20. De même, comme le joueur maîtrise partiellement le temps du jeu contrairement à un film, certains jeux proposent alors de revenir à la contemplation, comme pour une peinture. C'est le cas de "The Witness" par Jonathan Blow : l'île est parcourue de multiples statues, jeux d'ombres, devenant d'une certaine manière un musée virtuel. Certains autres jeux demandent parfois un investissement de temps et de connaissances sur le jeu lui-même tel qu'ils en deviennent presque hermétiques, et revêtent par ce même geste une valeur rituelle, où seul l'initié peut en percer une partie des secrets.
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