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coucou

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Apr 22nd, 2018
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  1. Dès le 9 mai, les parlementaires auront les yeux braqués sur le projet de révision constitutionnelle, qui sera présenté en Conseil des ministres. Depuis plusieurs semaines déjà, les oppositions accusent le gouvernement de vouloir affaiblir le Parlement à travers sa vaste réforme des institutions. L’Opinion s’est procuré l’avant-projet de loi constitutionnelle daté du 28 mars, quelques jours avant sa transmission au Conseil d’Etat. Le texte risque fort de conforter les députés, et surtout les sénateurs, dans leurs craintes.
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  3. Sans surprise, le gouvernement s’y arroge plus de pouvoirs en s’attaquant directement à l’ordre du jour du Parlement. Actuellement, seuls les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale – et certaines autres exceptions – peuvent être inscrits prioritairement à l’ordre du jour par l’exécutif. L’article 9 vise à étendre cette possibilité aux « textes relatifs à la politique économique, sociale ou environnementale déclarés prioritaires par le gouvernement sans que les conférences des présidents s’y soient conjointement opposées ». Ces conférences regroupent l’ensemble des présidents de groupe politique et de commission, à l’Assemblée et au Sénat.
  4. Un changement significatif, alors que la révision constitutionnelle de Nicolas Sarkozy instaurait un partage égal de l’ordre du jour entre le gouvernement et le Parlement, en leur attribuant deux semaines chacun. Si l’exécutif ne prévoit pas officiellement de revenir sur cette répartition, le champ des textes potentiellement prioritaires est si large qu’on imagine mal cet équilibre préservé. « On revient sur un aspect important de la révision de 2008, estime le constitutionnaliste Didier Maus. Cela dit, aujourd’hui, la majorité inscrit les projets gouvernementaux sur son propre agenda et fabrique de fausses propositions de loi, c’est-à-dire des textes en théorie soumis par les parlementaires mais qui émanent en fait des cabinets ministériels. »
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  6. Bicamérisme. La proposition de loi sur les fake news en est la parfaite illustration. Le texte a été rédigé par le gouvernement mais, l’ordre du jour qui lui est réservé étant totalement saturé, l’exécutif l’a fait « recycler » en proposition de loi, portée par le député de la majorité Benoit Studer, pour qu’elle puisse être examinée au printemps. « Le ministère de la Culture nous a envoyé des indications très précises qu’on a reprises », sourit un député LREM, membre de la commission des Affaires culturelles de l’Assemblée.
  7. Toujours fidèle à son mantra de l’efficacité, Emmanuel Macron veut aussi que les parlementaires légifèrent davantage en commission. L’objectif est que le débat dans l’Hémicycle se focalise uniquement sur les points principaux du texte. Par ailleurs, il compte en finir avec les interminables allers-retours des textes entre les deux chambres même si, dans les faits, la navette se tarit au profit de la procédure accélérée – une lecture par chambre – devenue la norme, surtout sous le quinquennat Macron.
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  9. La chasse aux amendements sans rapport avec le texte est ouverte. Nombre de députés profitaient à outrance des deux minutes de parole que confère la présentation d’un amendement pour s’offrir une visibilité dans l’Hémicycle
  10. En cas d’échec de la commission mixte paritaire (ultime étape où députés et sénateurs tentent de décrocher un accord sur le texte), « le gouvernement peut demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement », stipule l’avant-projet. Cette lecture interviendra « au plus tard dans les 15 jours » et « après une nouvelle lecture au Sénat », peut-on lire. Mais « l’Assemblée Nationale examine la dernière version du texte votée par elle », précise l’avant-projet. Les amendements déposés au Sénat seront tout juste « recevables », avec l’accord du gouvernement.
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  12. Voilà qui viendrait renforcer un peu plus la primauté des députés sur les sénateurs. « Une vraie restriction du dialogue entre les deux chambres, analyse Didier Maus. C’est vraiment contraire à l’esprit bicaméral de l’article 45 : si le Sénat s’oppose à une loi, l’effort de conciliation sera limité. » L’idée devrait faire grincer des dents au Palais du Luxembourg, où les sénateurs sont déjà remontés contre la baisse prévue de 30 % du nombre de parlementaires.
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  14. 40 pour saisir les Sages. L’exécutif a aussi dans son viseur la très longue session budgétaire, qui se tient chaque automne. Le vote du budget sera réduit de 70 à 50 jours. L’idée est de gagner autant de temps au printemps pour l’évaluation de ce même budget. Ce sont « les commissions permanentes de chaque assemblée qui entendront les ministres sur l’exécution de la loi de finances », peut-on lire à l’article 7 de la révision constitutionnelle. Une proposition qui rejoint celles formulées au gouvernement par la « whip » (coordinatrice de la majorité) de la commission des Finances, Amélie de Montchalin, avec plusieurs de ses collègues. Échaudés par la procédure parlementaire et ses redondances, ils avaient dressé une liste de mesures à soumettre à l’exécutif avec pour mots d’ordre efficacité et rapidité.
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  16. Députés et sénateurs peuvent souffler concernant le droit d’amendement. Le gouvernement avait un temps envisagé de limiter leur nombre en fonction de la taille du groupe parlementaire mais la mesure, qui faisait l’unanimité contre elle, ne figure pas dans le texte. En revanche la chasse aux amendements sans rapport avec le texte est ouverte. Nombre de députés profitaient à outrance des deux minutes de parole que confère la présentation d’un amendement pour s’offrir une visibilité dans l’Hémicycle. L’article 4 de l’avant-projet prévoit que les « propositions ou amendements » qui ne sont « pas du domaine de la loi » ou « sans lien direct avec le texte déposé », ou encore « dépourvus de portée normative », ne sont pas recevables. Une manière d’enrayer la profusion délirante d’amendements demandant, par exemple, que soient rédigés des rapports sur tel ou tel sujet. Le projet de loi asile et immigration de Gérard Collomb a fait l’objet de plus de 900 amendements en commission.
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  18. L’article 12 de l’avant-projet prévoit d’abaisser le seuil de parlementaires de 60 à 40 députés ou sénateurs pour saisir le Conseil constitutionnel. Le président du groupe France insoumise à l’Assemblée, Jean-Luc Mélenchon, avait dû former une alliance éphémère avec les socialistes pour saisir les Sages sur les ordonnances modifiant le Code du travail – en vain. Même facilité pour le nombre de parlementaires pouvant saisir la Cour de Justice de l’Union européenne.
  19. Pour modifier la Constitution, le gouvernement devra passer la très laborieuse épreuve du vote conforme des deux chambres, avant de réunir les 3/5e du Parlement en Congrès. Dans ce parcours d’obstacles, le gouvernement dispose d’un atout : le projet de loi constitutionnelle ne contient pas les mesures les plus clivantes de sa réforme des institutions, à savoir l’introduction d’une dose de 15 % de proportionnelle aux législatives et la limitation du cumul des mandats dans le temps.
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