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Jan 28th, 2020
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  1. Le guide a surpris avec trois nouveaux chefs triple étoilés : le Japonais Kei Kobayashi, Christopher Coutanceau et Glenn Viel.
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  3. Alors, Jean-François Piège, il les a ses trois étoiles ? Eh bien non. Pas plus que ses confrères Olivier Nasti, Jean Sulpice ou Jean-Georges Klein, dont les noms revenaient souvent dans la bouche des pronostiqueurs. Lundi 27 janvier, au Pavillon Gabriel, à Paris, lors de la cérémonie de lancement du guide France 2020, le Bibendum a fait des choix qui ont surpris le petit monde de la gastronomie.
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  5. Concernant les 49 primo-accédants, contrairement à l’an dernier, le Michelin n’a quasiment pas consacré de tables hype d’obédience Fooding (dont il possède 40 % des parts du guide). En revanche, il a été fidèle à sa réputation d’arpenteur du terroir, avec des récompenses dans l’Ain ou l’Allier. Parmi les onze nouveaux deux étoiles, on compte la Parisienne Stéphanie Le Quellec qui avait quitté le palace Prince-de-Galles, en 2019, pour se lancer en solo, ou encore l’Atelier Robuchon des Champs-Elysées – la mort du patron n’est donc pas un facteur discriminant.
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  7. Trois chefs ont atteint la plus haute récompense : le Japonais Kei Kobayashi, ainsi que Christopher Coutanceau, au restaurant qui porte son nom à La Rochelle, et Glenn Viel, à l’Oustau de Baumanière aux Baux-de-Provence (Bouches-du-Rhône). Ces deux derniers, âgés d’une quarantaine d’années et qui ont grandi face à l’Atlantique, proposent chacun une cuisine très attachée au respect de l’environnement.
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  9. Christopher Coutanceau, qui a travaillé avec Michel Guérard, Ferran Adria et Guy Martin, s’est fixé pour cap la défense d’une pêche durable et de l’antigaspillage. Glenn Viel, passé par le Plaza Athénée, le Meurice et le Cheval Blanc de Courchevel, a agrandi le potager du restaurant, créé un verger et implanté une ferme pédagogique.
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  11. Leur conscience écologique résonne avec les efforts du guide pour témoigner de son engagement en la matière : cette année, un nouveau pictogramme récompense les acteurs de « la gastronomie durable ». En même temps, ces chefs sont porteurs de belles histoires : Coutanceau a repris l’établissement familial en 2007 ; quant à Viel, il permet à l’Oustau de Baumanière de regagner sa troisième étoile perdue en 1990. « Sans Glenn, je ne l’aurais jamais récupérée », a affirmé avec émotion Jean-André Charial, le propriétaire et héritier.
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  13. Comme toujours, la cérémonie a charrié son lot de trémolos et de remerciements balbutiés par des cuisiniers à la gorge serrée qui ne trouvent plus leurs mots. « J’aurais aimé avoir une petite demi-heure pour pleurer avant de monter sur scène », a laborieusement articulé Glenn Viel en récupérant sa récompense. Comme toujours, on n’a pas échappé aux clips du sponsor, aux discours trop longs, aux gaffes de la maîtresse de cérémonie (Audrey Pulvar en l’occurrence). Comme toujours, la sélection était à très forte dominante masculine, mais le Michelin a appris de ses erreurs : les rares femmes du palmarès (six dans la catégorie une étoile) ont été mises en avant.
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  15. Bocuse, un « coup de com » ?
  16. Le Michelin fait attention, car il marche sur des œufs depuis la rétrogradation du restaurant de Paul Bocuse, l’Auberge du Pont-de-Collonges, à Lyon, qui se targuait de posséder les trois étoiles depuis 1965. Dévoilée le 16 janvier, la nouvelle a fait couler beaucoup d’encre, au point d’éclipser un temps les grèves de la « une » des journaux – comme s’en amusait la correspondante de Bloomberg en France sur Twitter. Pendant plusieurs jours, tandis que quantité de chefs affichaient leur soutien au restaurant déchu, des éditorialistes d’un certain âge se sont relayés sur les plateaux de télévision déplorant « un coup de com » ou, pourquoi pas, la fin du Michelin.
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  18. Si l’érosion des ventes du guide ne fait aucun doute (en 2007, il se vendait encore 150 000 exemplaires par an, en 2019, moins de 50 000), l’idée selon laquelle le Michelin voudrait redresser le cap en faisant parler de lui semble moins évidente. Les informations « sensationnelles » sont dévoilées pendant le lancement ; la lecture du guide, formel comme un code civil, ne convaincra pas les amateurs de presse boulevardière d’investir 24,90 euros pour lire des descriptions de plats.
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  20. Indéniablement, le guide Michelin a besoin d’argent, mais il le cherche autrement, par le biais de partenariats avec des constructeurs automobiles (le logo BMW est désormais brodé sur les vestes distribuées aux chefs étoilés), des pays désireux de le voir s’installer chez eux, ou avec des acteurs tels que TripAdvisor. En décembre 2019, un accord surprenant a été conclu avec le site de notation : les 14 000 restaurants sélectionnés par les inspecteurs du Michelin seront signalés sur le site Trip Advisor et les clients pourront les réserver directement sur le site La Fourchette, filiale de l’entreprise américaine. Les commissions devraient faire rentrer un peu de sous dans les caisses du Michelin tandis que sa présence sur TripAdvisor pourrait lui attirer les faveurs d’une clientèle plus jeune, généralement plus sensible à l’avis de leurs pairs qu’à celui de professionnels.
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  22. Ces décisions inopinées du Guide rouge semblent moins être le signe d’une désorganisation paniquée que celui d’un changement d’ère. Après des années d’immobilisme, où le Bibendum s’est refusé à déclasser les restaurants historiques, où l’affectif prenait le pas sur l’objectivité (« on ne peut pas lui faire ça! »), la tendance s’est inversée. La nomination de Gwendal Poullennec à la tête du guide en septembre 2018 n’y est sans doute pas étrangère.
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  24. Le directeur du guide l’a répété lors de la cérémonie : « On ne cherche pas à faire parler de nous, mais à donner aux clients les recommandations les plus actuelles et les plus justes. On réévalue les tables chaque année : c’est pour ça que les étoiles ont une vraie valeur. Il n’y a pas de traitement d’exception au guide Michelin. » Le monde actuel exige de la transparence. Lentement, et espérons-le, sûrement, le Michelin se met au pas.
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