Professionnalisme
Les charpentiers de l’image
Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
Je colle du gaffer
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
Je colle du gaffer
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
Je colle du gaffer
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
Je colle du gaffer
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
Je colle du gaffer
Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
Je colle du gaffer
Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
Je colle du gaffer
Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
Je colle du gaffer
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
Je colle du gaffer
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
Je colle du gaffer
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
Je colle du gaffer
Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
Je colle du gaffer
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
Je colle du gaffer
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
Je colle du gaffer
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
Je colle du gaffer
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
Je colle du gaffer
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
Je colle du gaffer
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
Je colle du gaffer
Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
Je colle du gaffer
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
Je colle du gaffer
Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Professionnalisme.
Les charpentiers de l’image