yarbi nmout

Avant l’acceptation, il y’a le déni. Lui avait eu tout le temps d’y réfléchir, chaque seconde passée à réaliser ce qu’il s’apprêtait à faire ce soir. A aussi profiter de son corps, ancrer chaque sensation, chaque trait, chaque toucher dans sa mémoire. Jinyeong sait que c’est tout ce qui lui restera quand il trouvera enfin la force d’entrouvrir ses lèvres en des mots meurtriers. Il sonnera la fin et celle de son existence. Parce qu’il vit à travers Hyunwoo, inhale de son amour et exhale de ses soupirs. Sans lui, c’est le retour vers le néant, mais c’est le seul moyen pour arrêter de le faire souffrir. Il est faible, incapable de continuer ainsi. Il épuise Hyunwoo dans ses nombreuses étreintes, entend son propre corps crier sa fatigue, chaque membre devant bien trop douloureux pour continuer. Il n’a pas envie que ça s’arrête, il veut en profiter le plus possible, parce que ce sera la dernière fois. Il ne faut pas l’oublier.
Jinyeong est dans l’acceptation de la fin, il en enclenche les mécanismes comme la première fois. Pas la moindre amertume, seulement son incommensurable amour qui le pousse à faire ce qu’il y’a de mieux. Aujourd’hui, il aime au point d’abonner toute trace d’égoïsme et si le bonheur de son homme est loin de lui, il y concède, avec douleur mais dévotion, parce qu’il le veut heureux. Peu importe la personne qui teintera enfin ses lèvres d’un sourire qui ne dissimule plus le moindre mal. Il n’aura évidemment pas la force d’y assister de ses yeux – de ses nombreux défauts, le masochisme n’a jamais fait partie de la palette (Hyunwoo s’y affiliait mieux). Mais le savoir heureux, entendre de simples rumeurs qui lui offriraient cette confirmation serait suffisant.
Hyunwoo est dans le déni.
La confusion est lisible sur les traits de son amour, ses mots font plus mal qu’il ne le pensait. C’est si ridicule de quitter la personne qu’on chérit le plus aux mondes. Jinyeong ne compte pas le nombre de personnes qui s’épuisent dans un émoi unique, mais lui abandonne ce qui lui est cher. Il l’embrasse sans cesse, ses lèvres aimantées par ceux de son ainé, elles savent que ce contact ne leur sera plus permis par la suite. Difficile mais nécessaire. Jinyeong garde ses priorités en tête, il se répété qu’il fait tout cela pour le bien de Hyunwoo, pas le sien, alors il se doit de continuer. Les mots fermes de son amant n’y font rien, il ne s’arrête pas, continue à lacérer son cœur. Le souffle de Hyunwoo le rend si faible, si maniable entre ses doigts ; il lui offrirait le monde, toute son existence s’il le fallait. Il veut s’éloigner pour limiter l’ascendant que l’homme a sur lui, pourtant il ne bouge pas. Ils ne seront plus jamais aussi proches. Il l’embrasse encore, de tout le désespoir qui le consume.
Sa tête bouge doucement, négativement, il ne s’arrêtera pas et le retour en arrière est impossible. Il trace doucement les contours des chemins qui les sépareront. Cette fois-ci sera la bonne, ils ont passé l’âge des retrouvailles des années après, il n’y a pas de paroles adolescentes dites sur le coup de la colère qui seraient facile à pardonner. Il n’a pas le cœur de se défiler du contact de Hyunwoo, il le quémande presque dans la manière dans ses doigts enlacent les siens avec force, répondent à sa possessivité. « Si, tu le sais bien. Une personne normale ne te fera jamais ce que je fais, ne te dire jamais toute ces choses horribles. » Par milliers lui reviennent les souvenirs de ses nombreux excès, ce n’est pas seulement le ton qui monte, mais les ongles qui s’enfoncent, les doigts qui entourent une gorge offerte. Le besoin de faire mal. Il se délecte de la faiblesse de Hyunwoo, de ses gémissements de douleur. Ce n’est pas ce qu’une personne saine ferait.
« Tu le sais, au fond de toi. » répète-t-il encore, le regard triste et la voix hésitante. Même ses doigts tremblent contre ceux du brun. Sa joue trouve réconfort dans la paume de Hyunwoo, il s’y laisse agréablement tomber. Il tourne légèrement la tête pour y déposer un long baiser, paupières mi-closes. Il donne l’impression de ne pas être touché par les mots de Hyunwoo mais ils étiolent son âme un peu plus à chaque syllabe. Il savait que ce serait difficile, il n’avait pas réalisé à quel point. Le jeune homme s’accroche encore à lui, assure un bonheur que Jinyeong doute de plus en plus être réellement capable de lui offrir, toujours. « Hyunwoo… » Son prénom est un supplice entre ses lèvres, si dur qu’il se transforme en un pénible gémissement. Il le répète une deuxième fois, tout contre ses lèvres dont il s’abreuve. La main de Hyunwoo autour de la sienne devient presque douloureuse mais il ne la laisserait pour rien au monde. Sa paume aura tout le temps d’être froide plus tard.
« Je te rends heureux jusqu’à ce que je te rende triste. »  Et c’est parce qu’il l’aime tant, qu’il le laisse. Il ne veut plus vivre dans la peur de prononcer des mots qu’il  ne pense pas sous le coup de la colère. « Je t’en supplie. » qu’il le laisse partir. Qu’est-ce qu’il aimerait avoir devant ses yeux le Hyunwoo d’avant, celui qui n’avait pas su le retenir la première fois où il l’avait quitté.
Sa main libre remonte doucement le long du torse de Hyunwoo, sa gorge qu’il avait à maintes reprises horriblement marqué et enfin sa joue où elle demeure. Les mots résonnent. « Je te quitte, mon cœur. »