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- Ces antisémites que la France ne veut pas voir
- Jean-Dominique Merchet, L'Opinion 4 août 2025
- Accusée d'« apologie du terrorisme », une étudiante évacuée de Gaza par Paris a fnalement quitté le territoire national?
- Nour Attalah a quitté la France pour le Qatar, a annoncé dimanche le ministre français des Afaires étrangères. Le parquet de Lille, où elle était inscrite à l'Institut d'études politiques, a ouvert une enquête contre cette étudiante originaire de Gaza qui a relayé des messages appelant à la mort des juifs avec une image d'Hitler. Parallèlement, les ministères des Afaires étrangères et de l'Intérieur ont déclenché une enquête administrative pour comprendre comment elle avait pu échapper à la vigilance des services en charge d'instruire son dossier. Un autre cas vise un journaliste gazaoui lui aussi récemment arrivé.
- C'est un crash en direct pour la diplomatie humanitaire de la France à Gaza. Le cas de Nour Attalah, l'étudiante inscrite à Sciences Po Lille accusée d'antisémitisme quelques jours après son arrivée en France, jette une lumière crue sur les dysfonctionnements de l'administration autant que sur l'aveuglement volontaire d'une partie de ses responsables. L'affaire intervient alors que le président Macron vient d'annoncer son intention de reconnaître l'Etat de Palestine, suscitant de fortes oppositions à droite et dans la communauté juive.
- Nour Attalah n'est sans doute pas un cas unique : le journaliste Fadi Hossam Hanona, récemment arrivé à Paris, est désormais accusé d'avoir diffusé des messages antisémites, tels que « les juifs sont des fils de chiens et je suis d'accord pour les tuer et les brûler comme Hitler l'a fait. » Collaborateur de France 24, il avait été écarté par le New York Times en 2022. D'autres cas ne sont pas exclus, assurent les militants juifs à l'origine de ces révélations, comme le très actif @swordofsalomon.
- Nour Attalah, 25 ans, avait tout pour plaire à la diplomatie humanitaire du Quai d'Orsay… jusqu'à la découverte de son penchant pour Hitler. Titulaire d'une licence en droit à l'université de Palestine à Gaza, elle parle bien le français et a obtenu, en 2023, le premier prix (ex-aequo) d'un concours organisé par l'Institut français sur le thème « Dis-moi dix mots à Gaza ». Candidate pour poursuivre ses études en France, elle a été sélectionnée par Campus France, via l'attaché de coopération universitaire du Consulat général de France à Jérusalem. Elle obtient une bourse – 860 euros par mois – et s'inscrit à l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait commencer ses études de master en septembre.
- « Occident pervers ». Avec un visa pour la France, elle a pu sortir de Gaza le 9 juillet, et elle est arrivée à Paris deux jours plus tard, via la Jordanie. Elle fait partie d'un groupe de 37 Palestiniens qui ont rejoint la France à cette date – ce qui a été le cas de 292 personnes depuis le début de l'année. Le ministère français des Afaires étrangères explique qu'après avoir évacué les ressortissants français – souvent binationaux – de Gaza, c'est désormais le cas d'étudiants, d'artistes ou de collaborateurs des médias français. Arrivée à Lille, Nour Attalah a été provisoirement hébergée au domicile personnel du directeur de l'IEP, l'historien Etienne Peyrat, alors en mission à l'étranger. C'est la première fois qu'il faisait un tel geste, souhaitant ainsi témoigner « de l'ouverture et de la solidarité » de l'IEP.
- Las! Mercredi 30 juillet au matin, des groupes militants juifs révèlent le contenu de messages de Nour Attalah sur le réseau X. Il s'agit de messages arabes repostés et non pas écrits de sa main, mais le contenu est explicite. L'un d'entre eux, datant de septembre 2024, est illustré par une photo d'Hitler. Il appelle au meurtre des juifs : « Tuez leurs jeunes et leurs vieux, n'ayez pas pitié d'eux. Tuez-les partout. » Un autre message reposté juste après le pogrom du 7-Octobre : « Le tournage [de l'exécution des otages israéliens] doit être de haute qualité » pour les difuser auprès des « médias de l'Occident pervers ». D'autres sources évoquent une critique de la fête chrétienne de Noël.
- Le tollé est immédiat. Sur CNews, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a le mot qui tue : « Il y a assez d'antisémites en France, pas besoin d'en importer. » Mais, au sein de l'administration, les ministères des Affaires étrangères, de l'Intérieur et de l'Enseignement supérieur se renvoient la balle. La secrétaire générale du Quai d'Orsay doit même retirer un message sur X après un coup de fl du directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur. Dès mercredi, le chef de la diplomatie française, JeanNoël Barrot, est contraint de reconnaître que « les criblages effectués par les services compétents n'ont pas parfaitement fonctionné », et ouvre une enquête. Vendredi, le ministre annonce un gel des évacuations de Gaza tant que l'enquête est en cours et se défausse sur « les autorités israéliennes »… Jeudi, le parquet de Lille a ouvert une enquête pour « apologie du terrorisme » et « apologie de crimes contre l'humanité » à l'encontre de Nour Attalah, qui a été placée en garde à vue durant quelques heures. Désinscrite de l'IEP de Lille, elle a dû quitter le logement du directeur de l'établissement. Le Quai d'Orsay estime qu'« elle a vocation à quitter le territoire national ». Nour Abdallah n'est pas, juridiquement, une réfugiée. Dimanche, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a annoncé qu'elle avait fnalement quitté la France à destination du Qatar.
- Comment en est-on arrivé là? Les services de renseignement israéliens n'ont, en efet, pas alerté la France sur le profl de Nour Attalah. Le ministère français de l'Intérieur a consulté les diférents fchiers de police et la jeune étudiante n'y était pas enregistrée comme une menace potentielle pour la France. Il semble clair que les services du Consulat général de France à Jérusalem n'ont, de leur côté, pas pris le soin de consulter les réseaux sociaux de l'étudiante au cours de l'instruction de son dossier. L'enquête dira pourquoi, espérons-le. Le Consulat général de France à Jérusalem est, de facto, la représentation diplomatique de la France auprès des Palestiniens – faisant fonction d'ambassade. Son personnel est traditionnellement plus sensible à la cause palestinienne que celui de l'ambassade de France en Israël, installée à Tel Aviv.
- « Décalage mental ». Au sein de l'administration française, personne ne semble avoir une idée précise de qui est Nour Attalah. Portant le voile, elle serait la nièce d'un ancien garde du corps de Cheikh Yassine, le fondateur du Hamas. Rien dans ses messages ne témoigne d'une quelconque distance critique avec les islamistes du Hamas. Elle souhaitait se destiner à l'humanitaire pour aider les Gazouis, confait-elle à RMC lors de son arrivée à Lille. Selon nos sources, « Nour Attalah a eu du mal à réaliser » ce qui lui arrivait, lors du déclenchement de la polémique, mercredi matin. Un interlocuteur proche du dossier évoque « un décalage mental énorme » entre l'étudiante et la situation française. Un diplomate, bon connaisseur du Proche-Orient, confrme : « Elle vient d'un autre monde. » C'est tout le problème… et le non-dit de cette afaire.
- Nour Attalah vient d'un monde où la haine des juifs va de soi. Reposter une phrase d'Hitler n'est pas un problème, lorsqu'on est nourri à la propagande des islamistes du Hamas ou des nationalistes arabes. Le grand mufti de Jerusalem, Hadj Amine al-Husseini, figure centrale du nationalisme palestinien d'avant la création d'Israël, fut un allié des nazis, contribuant au recrutement de SS musulmans dans les Balkans.
- Si, depuis 1945, les Occidentaux ont fait d'Hitler et de la Shoah l'incarnation du mal absolu, il n'en va pas de même dans le monde arabo-musulman et une grande partie des pays du Sud. Là, la fgure du mal est représentée par le colonialisme européen et le sionisme – qui en serait une version juive. Pour un Palestinien de Gaza, les juifs ne sont pas les survivants d'Auschwitz, mais les oppresseurs israéliens. Cette haine, dont la dimension religieuse ne doit pas être sous-estimée dans une population pieuse, est entretenue par le système scolaire palestinien financé par les Nations unies, via l'UNWRA. Les manuels scolaires palestiniens véhiculent ainsi des clichés antisémites. A cet égard, Nour Attalah est un cas d'école : elle vient de se fracasser sur le choc des cultures entre deux mondes.
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